Photo par Youcef Bioud
Les moissons du ciel
Voici un champ de blé sans gluten… En fait, ces faisceaux de tiges qui se pressent les unes contre les autres sont des nanofils de phosphure d'indium. La procédure pour les obtenir est assez simple. On fait baigner le matériau dans une solution d'acide fluorhydrique, où passe un courant électrique, et les filaments se forment tout naturellement. La structure tridimensionnelle qui en résulte intéresse tout particulièrement l'industrie des cellules photovoltaïques, car la surface de captation des photons émis par le Soleil s'en trouve augmentée. De fait, la lumière peut être absorbée aussi bien en surface que dans l'épaisseur du matériau. Une manière encore plus efficace de moissonner l'énergie solaire. Diamètre d'un filament : entre 20 et 200 nanomètres. Fabrication par gravure électrochimique et observation par microscope électronique à balayage.
Prix du jury
Photo par Chérif Matta
Les liaisons ingénieuses
Le biochimiste averti reconnaîtra, au premier coup d'œil, le couple de bases nucléiques guanine-cytosine. Cette configuration moléculaire, bien que familière, représente toutefois une première. Car, sur cette image, les liaisons entre les noyaux des atomes n'ont pas été dessinées : elles ont été calculées de manière quantique. En effet, nous avons sous les yeux une carte topographique de la densité électronique de chacun des atomes qui partitionnent le territoire. Cette densité est illustrée par les petites lignes qui convergent vers les noyaux. Et c'est l'interaction de ces champs de potentialité qui fait émerger les « chemins de liaisons » optimaux de densité électronique reliant, entre eux, les atomes.- Image générée par ordinateur des « chemins de liaisons » d'après la théorie du chimiste théoricien canadien Richard Bader (1931-2012).
Prix du jury
Photo par Émilie Peco
Intégrité territoriale
Nous voici au cœur du système nerveux d'une larve de drosophile, qui fonctionne selon les mêmes principes de base que celui des mammifères (dont l'humain). On y distingue trois couples d'astrocytes (en blanc) délicatement enroulés autour des voies neuronales longitudinales (en bleu). D'autres astrocytes sont présents, mais n'ont pas été révélés par le marquage. Ces cellules gliales aux ramifications complexes sont essentielles au fonctionnement du système nerveux central, mais de nombreux rôles restent encore à découvrir. Cependant, il apparaît clairement que les astrocytes ne se distribuent pas au hasard : ils couvrent systématiquement les mêmes territoires neuraux. Reste à comprendre les mécanismes qui leur montrent le chemin.
Prix du jury
Photo par François Rheault
Matière blanche haute en couleur
Nous avons tous une vague idée de la matière grise : ces replis à la surface du cerveau. Mais la matière blanche qui se cache en dessous est moins familière. Elle se compose d'une multitude de réseaux de câblages faits d'axones, qui sont les prolongements des neurones. Ces câbles sont recouverts de myéline, une substance blanche facilitant la circulation de l'information électrochimique. D'un cerveau à l'autre, ces réseaux d'axones présentent tous la même organisation, bien qu'ils aient chacun leurs caractères distinctifs. Grâce à l'imagerie médicale, et de puissants logiciels, on peut procéder à la dissection virtuelle d'un cerveau pour ne laisser apparaître que ses principales autoroutes nerveuses.
Prix du public
Photo par Ehsan Rezabeigi
Reconstruire des os endommagés
Utiliser des implants en métal pour remplacer un morceau d’os endommagé à la suite d’une maladie ou d’un accident peut engendrer des complications sérieuses, y compris l’infection et le rejet des implants par l’organisme. Un stagiaire postdoctoral à l’Université Concordia effectue de la recherche pour trouver une meilleure solution : un implant léger en mousse de polymère et de verre qui aide à la guérison et à la régénération du tissu osseux. Les structures florales illustrées dans l’image sont composées d’un plastique (acide polylactique ou PLA) non toxique et biodégradable qui pousse à la surface d’une infime particule de bioverre d’un diamètre 10 fois inférieur à celui d’un cheveu humain. Les pétales de ces structures florales permettent à des milliers de cellules osseuses de se répliquer, tandis que la particule de bioverre, à mesure qu’elle se décompose, nourrit ces cellules osseuses d’éléments essentiels tels que le calcium et le silicium. Cet implant, qui finit par se résorber dans le corps et être remplacé par du tissu osseux naturel, permet donc d’améliorer et d’accélérer le processus de guérison des os fracturés.
Prix du jury
Prix du public
Photo par Kate Donaleshen et James Robinson
La vie cachée d’un parasite
Une petite guêpe parasite (Megastigmus spermotrophus) est un des nombreux insectes ravageurs qui s’attaquent au sapin de douglas, moteur économique majeur dans l’ouest du Canada. La femelle dépose ses oeufs dans les graines de l’arbre, où les larves éclosent pour ensuite se nourrir de leur contenu et les détruire par le fait même. Étant donné que les arbres ne présentent aucun signe de dégâts jusqu’à ce que les M. spermotrophus adultes émergent des graines (ce qui peut prendre jusqu’à cinq ans), les chercheurs examinent les graines aux rayons X pour détecter celles qui sont infectées. Ils utilisent ces images pour étudier la taille des graines, leur emplacement dans le cône et d’autres caractéristiques qui poussent ces insectes parasites à choisir certaines graines plutôt que d’autres. Cette image montre que quelques cônes de sapin de douglas peuvent abriter un nombre élevé de larves de M. spermotrophus, mais aussi comporter des graines vides et d’autres contenant des embryons végétaux en développement. L’étude montre les effets directs de ces parasites sur la santé des arbres, renseignements qui seront utiles pour les pratiques de gestion des forêts.
Prix du jury
Photo par Simon Octavio Valdez Juarez
30 000 kilomètres à tire-d’aile
La fauvette jaune illustrée dans cette photo excelle dans les vols long-courriers. En effet, la bague de repérage de couleur sur sa patte témoigne de l’endurance remarquable de cette espèce d’oiseau migrateur. J’ai bagué cette fauvette en janvier 2012 près d’un arbre situé entre deux champs de piment du Chili dans l’État du Jalisco, au Mexique, où elle chassait des araignées et des chenilles (comme dans l’image). En avril, elle a entrepris sa migration vers le nord et j’ai perdu sa trace, mais l’année suivante, elle était de retour dans le même arbre. L’analyse de ses plumes indiquait que son lieu de nidification se situe au Yukon ou dans les Territoires du Nord-Ouest (Canada). Cette photo date de 2015, ce qui signifie que ce petit oiseau de 9 grammes a migré du Canada au Mexique au moins quatre fois, soit une distance impressionnante de 30 000 kilomètres. Cet oiseau est l’une des 200 fauvettes jaunes qui font l’objet d’une étude visant à découvrir les effets de l’agriculture sur l’écologie et la survie des oiseaux migrateurs.
Prix du jury
Photo par Mélanie Aubin et Valérie Lecomte
Cimetière de verre
Ces silhouettes fantomatiques sont des vestiges de microalgues, les diatomées. Le spécimen en bleu, de type Pleurosigma sp., est rarement observé en entier dans les échantillons de sédiments provenant des lacs du Nord québécois. D'une remarquable symétrie, cette microstructure est en fait le squelette externe de l'organisme, composé de silice. Les diatomées sont présentes dans presque tous les milieux aquatiques, et se retrouvent donc systématiquement dans les analyses sédimentaires. Pour réaliser cet examen, une fois séchés et tamisés, les sédiments sont saupoudrés sur un ruban adhésif de carbone afin d'être scrutés au microscope électronique. L'analyse permet, entre autres, d'étudier la répartition des métaux dans les sédiments de lacs.
Photo par François Chartier et Patrick Laprise
Des larves qui ne manquent pas d'air
Nous sommes à l'intérieur de l'embryon d'une drosophile à quelques heures de l'éclosion sous la forme d'un petit ver microscopique. Le cas échéant, sa respiration serait assurée par tout un réseau de ramifications (en orangé). Ce sont des petits tubules remplis d'air qui acheminent l'oxygène partout dans le corps de la larve. Les chercheurs les étudient attentivement, car les mécanismes qui dictent les élongations et les bifurcations de ces tubules, chez la drosophile, se sont conservés dans l'évolution jusqu'à nous. Et leurs dysfonctionnements sont à l'origine de nombreuses pathologies chez l'humain. C'est dire que les mouches à fruits peuvent encore conduire à de fructueuses découvertes.
Photo par Dominique Claveau-Mallet
Filtre à scories
Ces sphères minuscules sont des scories, des roches artificielles issues des fonderies où se fait l'extraction du fer. Bonne nouvelle, elles pourraient bien sauver nos lacs des invasions de cyanobactéries, ces algues bleu-vert qui prolifèrent dès qu'augmentent les concentrations de phosphore. De fait, les résidus sidérurgiques que sont les scories contiennent de la chaux qui réagit avec le phosphore dissous dans l'eau. La réaction de précipitation produit alors des cristaux d'hydroxyapatite, la masse granuleuse apparaissant dans la partie supérieure de l'image. Les cristaux se fixant aux scories, ils y poursuivent leur croissance pour ainsi piéger plus de phosphore. Une idée astucieuse pour de l'eau cristalline….
Photo par Julie Constanzo, Martin Lepage, Benoit Paquette
Panique écarlate
Sur cette imagerie par résonance magnétique (IRM), on aperçoit le réseau sanguin d'un cerveau de rat, vu du dessus. La région plus dense, en haut à droite, initialement saine, a été ciblée par radiothérapie. Le but était de reproduire les effets secondaires de ce traitement. En effet, si cette technique d'irradiation entraîne la nécrose (mort) des tumeurs, elle endommage parfois les tissus cérébraux environnants. Dans une sorte de réaction de « panique », des vaisseaux sanguins se mettent alors à croître de façon anarchique. Grâce à la présente méthode d'utilisation innovante de l'IRM, il serait désormais possible pour les cliniciens de suivre efficacement l'évolution de ces changements vasculaires. Le cas échéant, les patients pourraient bénéficier de l'administration précoce de médicaments appropriés.
Photo par Julie Alix Denoncourt, Steve Charette, Richard Janvier
Un compacteur à déchets
Le protozoaire Tetrahymena, dont on ne distingue qu'une fraction en bleu, est un organisme unicellulaire vivant en eau douce. Celui-ci revient d'une chasse aux bactéries (taches vertes) dont il se nourrit. Elles se retrouvent stockées dans une vacuole digestive en compagnie des défécations produites par d'autres protozoaires (en orangé). Une fois sa digestion terminée, le protozoaire compacte les résidus de son repas pour former des boules fécales plus massives (en rouge). Or, certaines bactéries, qui survivent à la digestion, peuvent s'y retrouver piégées. Une fois évacuée, la boule fécale leur offrira une bonne protection contre les aléas d'un environnement décidément hostile.
Photo par Yann Develle
Réflexe lumineux
Collée contre la paroi d'un tube à essai, on distingue l'extrémité de la moelle épinière d'une souris. Un arc lumineux, produit par une technique photographique appelé light painting, vient compléter cette représentation artistique du réflexe rotulien. C'est le fameux réflexe qui fait automatiquement lever la jambe lorsqu'on frappe le tendon situé sous la rotule. Ce stimulus, illustré par la ligne rose, est modulé au niveau de la moelle épinière, puis il est réacheminé en sens contraire par un motoneurone, ligne devenue violette, ce qui provoque la réaction musculaire. Les chercheurs étudient ce circuit nerveux en vue d'améliorer la récupération motrice des personnes victimes d'une lésion de la moelle épinière.
Photo par Weimeng Ding et Ariel Wilson
Un éboueur qui roule sur l'or
Voici un macrophage (en bleu), une cellule du système immunitaire, en train d'engloutir de minuscules pépites d'or (en jaune) sur la surface d'une rétine de rat (mauve). Depuis peu, ces nanoparticules d'or sont utilisées afin de cibler des cellules et d'y acheminer des médicaments de façon localisée. Toutefois, cette technique est peu utilisée dans l'œil, un organe complexe et fragile. C'est pourquoi l'observation de cet éboueur rétinien en pleine action, rarement capté à si petite échelle, représente un coup de chance inouï. Et c'est une indication rassurante que les nanoparticules d'or ne risquent pas de s'accumuler dans l'œil… puisque les macrophages sont là pour faire le ménage.
Photo par Pascal Dubé
Courants artistiques du Saint-Laurent
Pour faciliter la navigation fluviale, on modélise les courants portés par les marées. Ici sont illustrées les prédictions numériques des courants du fleuve Saint-Laurent entre Québec et Rimouski. Chaque couleur correspond à une direction de courants : rouge vers le nord, bleu clair vers le sud, ou encore vert vers l'est. Plus la nuance tend vers le pâle, plus le courant est rapide. Le mince filet vert représente la rivière Saguenay, et l'on y voit l'intense activité au confluent (en blanc). Cette modélisation ne représente qu'un instant dans la vie du fleuve. En réalité, les courants virent sans cesse, et dans quelques heures, ce jet de peinture aura une allure complètement différente!
Photo par Maeva Giraudo,Magali Houde, Guillaume Cottin
Un petit plancton aux grands enjeux
Voici Daphnia, une espèce très commune de zooplancton d'eau douce. Elle possède un œil unique, et ses antennes lui servent principalement à nager et à se nourrir. Sous sa carapace transparente, on voit ses protéines d'hémoglobine (en orangé), transportant l'oxygène. Son alimentation riche en algues microscopiques donne cette couleur verte à son tube digestif. En dessous, on aperçoit quelques œufs, qu'elle a possiblement produits seule, en parthénogenèse. Il est essentiel d'étudier la daphnie et les effets des polluants sur sa reproduction et sa croissance, car elle est à la base de la chaîne alimentaire de milliers d'espèces. De fait, si elle venait à disparaître, c'est tout l'écosystème aquatique qui s'effondrerait.
Photo par Mathieu Lapointe
Éphémère fleur de verre
Quotidiennement, on dépose nos contenants de verre dans le bac vert. Or, à ce jour, il existe peu de manières originales de recycler le verre concassé. Toutefois, grâce à une astucieuse technique, il est appelé à connaître une seconde vie en contribuant au traitement des eaux usées. Plongés dans un bassin d'eau souillée, avec un polymère qui sert de liant, ces fragments de verre ont capturé leur lot de contaminants. Par un splendide hasard, ceux-ci ont pris la forme d'une fleur étincelante, qui telle une ancre descendra rapidement vers le fond du bassin de traitement. Cette prometteuse méthode de purification de l'eau est déjà aussi performante que l'utilisation traditionnelle du sable extrait des sols.
Photo par François-Joseph Lapointe
Je touche donc je suis
Nous avons devant les yeux un réseau social de bactéries. Pour obtenir cette image, le chercheur a serré la main de 1001 personnes croisées dans la rue. Il prélevait sur sa paume à intervalles réguliers une population microbienne de plus en plus diversifiée. Il a ensuite analysé l'ADN de ces communautés, avant de traduire les données dans un logiciel de visualisation, attribuant une couleur différente à chaque échantillon. Les « fils » relient les bactéries ayant une similarité génétique d'au moins 95%, jusqu'à former parfois de véritables pelotes! Contrairement aux idées reçues, la plupart des bactéries ont un rôle bénéfique pour notre corps, et ce genre d'expérience permet de mieux comprendre comment elles se comportent « en société ».
Photo par Andrée-Anne Marchand et Julie O'Shaughnessy
Usées jusqu'à l'os
En vieillissant, certaines personnes développeront l'arthrose rachidienne, une forme de détérioration de la colonne vertébrale. Sur cette radiographie, deux vertèbres lombaires superposées présentent des zones de dégénérescence colorées en jaune et bleu. En vert, la zone de superposition de ces deux régions montre le rétrécissement du canal vertébral, ce qui compresse la moelle épinière. Appelée sténose centrale, cette condition entraîne une perte de mobilité chez les patients, en plus d'occasionner de vives douleurs. Bien que ce processus ne soit pas réversible, des entraînements spécifiques sont susceptibles d'améliorer leur qualité de vie, en attendant l'intervention chirurgicale.
Photo par Jolyane Meloche
Soif d'éternité
Toutes nos cellules possèdent une kyrielle de petites organelles qui sont productrices d'énergie : les mitochondries (en orangé). Mais l'activité de ces minuscules centrales brûle à petit feu chacune de nos cellules. C'est une mort programmée, toute naturelle. Or, les cellules de type cancéreux, elles, refusent de mourir, pour mieux se multiplier, et désactivent donc leurs mitochondries. C'est ici le cas pour l'hypertension artérielle pulmonaire. Dans la présente cellule, on distingue, par fluorescence orangée, les mitochondries désactivées, tandis que le noyau, lui, nous apparaît dans un bleu spectral. Grâce à cette technique de marquage, il est possible de déterminer si des cellules déréglées répondent aux traitements… afin qu'elles abandonnent leur suicidaire quête d'éternité.