« L’effet grand-mère » : un rôle indispensable dans l’évolution démographique

Photo de Krystel V. Morin/Université Bishop's.

Dans une perspective biologique, la ménopause chez les femmes pose une énigme: comparativement à ce qui est observé chez d’autres espèces, elle se produit bien plus tôt et bien longtemps avant la fin de l’espérance de vie. Cela a amené des chercheurs de l’Université de Sherbrooke et de l’Université Bishop’s à se demander si la fin relativement hâtive de la capacité de reproduction chez les femmes pouvait tout de même présenter des avantages par rapport à la transmission des gènes, en leur permettant d’aider leurs filles à fonder une plus grande famille.

Leurs découvertes, publiées dans la revue scientifique Current Biology, fournissent un nouvel appui à « l’hypothèse de la grand-mère. »

En étudiant les données démographiques exceptionnellement détaillées disponibles à propos des premiers habitants Français au Québec entre 1608 et 1799, le premier auteur Sacha Engelhardt – postdoctorant en biologie à l’Université de Sherbrooke, dont le travail était sous la supervision conjointe de la Pre Fanie Pelletier, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en démographie évolutive et conservation de l’Université de Sherbrooke, et du Pr Patrick Bergeron du Département de Biologie de l’Université Bishop’s – a découvert que la présence d’une grand-mère à proximité de ses filles était associée à davantage de naissances de petits-enfants ainsi qu’à une probabilité accrue que ces petits-enfants atteignent l’âge de maturité.

« Les résultats de l’étude suggèrent que les grands-mères ont joué un rôle indispensable dans la population préindustrielle du Québec », explique M. Engelhardt. « Nous étions vraiment intéressés à regarder l’importance de l’incidence géographique sur les traits d’histoire de vie des humains, comme l’âge à la première reproduction, le nombre d’enfants qui sont nés, et le nombre d’enfants qui survivaient jusqu’à l’âge de 15 ans, par exemple. »

« Dans notre étude, les femmes dont les mères étaient toujours vivantes avaient davantage d’enfants, et un plus grand nombre de ces enfants atteignaient l’âge de 15 ans, » explique le Pr Bergeron. « Il est intéressant de noter que “l’effet grand-mère” diminue lorsque la distance géographique entre la grand-mère et la fille augmente, ce qui suggère que le potentiel de soutien soit lié à la proximité géographique.  

« Les résultats démontrent que les femmes dont la mère était vivante et à proximité géographique parvenaient en moyenne à avoir deux enfants de plus et que le nombre d’enfants qui atteignaient l’âge de 15 ans augmentait en moyenne d’un enfant, comparativement aux familles dont la grand-mère était décédée, » explique la Pre Pelletier. « Il s’agit d’un avantage significatif du point de vue de l’évolution, surtout si l’on considère qu’à certaines périodes de cette époque, la proportion d’enfants qui ne survivaient pas un an atteignait parfois le tiers des naissances. »

Afin d’avoir accès aux vastes quantités de données sur lesquelles ils fondent leurs conclusions, les chercheurs ont collaboré avec le Pr Alain Gagnon et la Pre Lisa Dillon, du Programme de recherche en démographie historique de l’Université de Montréal. L’étude a également bénéficié de l’utilisation du superordinateur Mammouth du Centre de calcul scientifique de l’Université de Sherbrooke pour analyser les centaines de milliers de points de données utilisées.

L’étude a bénéficié de l’appui financier du Fonds de recherche du Québec – Nature et technologies (FRQNT), de la Chaire de recherche du Canada en démographie évolutive et conservation, du Centre de la science de la biodiversité du Québec, du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH), de la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI) ainsi que du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG).

Cet article a été reproduit avec la permission de l’This link will take you to another Web site Université Bishop's.

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